Et les livres sans images, alors?

Viens de le finir :

Omsk a écrit:

Ma dernière grosse claque littéraire. D'ailleurs, pour tout dire, ça faisait un moment que je n'avais pas dévoré un aussi bon bouquin. Un de ceux que l'on voudrait qu'il ne finisse jamais. Il met en scène la courte vie de John Kaltenbrunner dans la ville fictive de Baker, USA. Les unités de temps et de lieu sont floues, bien qu'on puisse prédire naviguer dans les années 70, dans la Corn-Belt.

La bourgade de Baker (4 000 âmes) est un repère de rednecks allumés et bas du front, ressassant aisément l'imaginaire God, Guns, Pick-up. Les 600 pages du roman (dans une veine à la fois acide et burlesque, en même temps qu'assez tragique) figurent l'opposition communauté / Kaltenbrunner. Ce dernier collectionne les maldonnes (et c'est un doux euphémisme), se coltinant des charretées de merde tout au long du livre. On y assiste fasciné à une grève dantesque des éboueurs, à des bastons légendaires dans des bars à poivrots, à une guerre larvée autour d'un match de basket... En même temps, Egolf livre une magnifique tirade (presque sociologique, autant que barrée) sur le Midwest profond : violence, racisme, alcoolisme, crétinerie ambiante... A tel point, qu'il suffirait presque d'ouvrir son roman au hasard pour saisir un bon mot ou une formule ciselée.

Ayant eu à une époque des prétentions littéraires, je suis tombé en extase devant un passage situé dans une usine d'abattage de volailles (pour avoir bossé un été dans un site équivalent, j'aurai aimé pouvoir pondre un tel texte). Si vous avez aimé "La conjuration des imbéciles", vous adorerez "Le seigneur des porcheries". D'ailleurs, des points de comparaison demeurent : suicide comme Toole passé la trentaine, reconnaissance tardive ou posthume du monde littéraire, anti-héros en butte au monde environnant (bien que Kaltenbrunner s'approche autant d'Ignatius qu'il s'en éloigne)...

Foxhole a écrit:

Eh mais je crois bien que c'est ce que je lisais à Binic et que j'arrivais pas à résumer à Ratel. Je confirme, extrêmement bien écrit.

Guic' the old a écrit:

Je confirme à mon tour, ce livre est une grosse tuerie.
Comment un gamin pas génial mais malin est débrouillard peut voir sa vie ruinée juste parce qu'il bvit dans un bled de rednecks bigots, alcooliques et crétins.

Chef d'oeuvre.

Malheureusement, les livres suivants d'Egolf ne sont pas aussi biens que celui ci.
(Remarque: tout américain que soit Egolf, ce premier roman a été écrit en français, donc pas de question à se poser sur la traduction)

Avis à la population : feriez bien d'écouter ce qu'en ont dit les zôtes
Comme ch'uis bête, j'ai pas vraiment de définition de ce qu'est la "Littérature", mais là-dedans c'est certain, y en a.
Sacré put*in de bordel de bouquin ! (et je me tempère)

Bon ok, j'ai compris. Vu que j'avais bien aimé La conjuration des imbéciles, je vais devoir me le procurer dès ce soir. Ca fera de la lecture pour le train avant l'AG

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

ben ouais comme avec les gens du Nord... pourtant dans les deux cas il y a quand même un fonds de vérité

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

C'est extrêmement réducteur comme vision par rapport à ce que peut contenir ce bouquin, qui tient presque plus de la fresque à mes yeux...
Sachant qu'en plus, les personnages sont construits, certes par touche, mais ne sont pas des stéréotypes (enfin, des stéréotypes avec du fond,si tu vois ce que je veux dire).
Non c'est vraiment un bouquin à la fois déprimant dans ce qu'il présente et jouissif dans sa façon de faire éclater à chaque coin de page la mesquinerie de la médiocrité ordinaire (et c'est même pas typiquement américain, n'importe quel village sous nos latitudes a son lot de personnages du genre.)

Bref, ptêt qu'il te plaira pas pour autant, mais faut pas non plus que tu laisses cet a priori sur les a priori que tu crains de rencontrer dans le bouquin t’empêcher de l'ouvrir...

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

Anti-sud, pas vraiment : ça se passe dans un comté imaginaire de la "Corn Belt" Et franchement ça vise dans le fond bien au-delà de la Corn Belt et de l'Amérique, les rouages sociaux à l'oeuvre sont aisément transposables dans n'importe quelle contrée occidentale (ou "assimilée")...

edit : on se rejoint avec Guic, tant pis ça fait doublon ^^

Dahu Clipperton a écrit:

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

Anti-sud, pas vraiment : ça se passe dans un comté imaginaire de la "Corn Belt" Et franchement ça vise dans le fond bien au-delà de la Corn Belt et de l'Amérique, les rouages sociaux à l'oeuvre sont aisément transposables dans n'importe quelle contrée occidentale (ou "assimilée")...

edit : on se rejoint avec Guic, tant pis ça fait doublon ^^

Il est pas si imaginaire que ça, Dahu. Autant la ville existe pas, autant c'est jamais précisé vraiment, autant il y a vraiment un comté de Greene en Géorgie...
Sinon, vous trouvez pas qu'à cause de Maupassant, Flaubert tout ça, cultiver les stéréotypes anti-normand c'est un grand sport franchouillard?

Guic' the old a écrit:

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

C'est extrêmement réducteur comme vision par rapport à ce que peut contenir ce bouquin, qui tient presque plus de la fresque à mes yeux...
Sachant qu'en plus, les personnages sont construits, certes par touche, mais ne sont pas des stéréotypes (enfin, des stéréotypes avec du fond,si tu vois ce que je veux dire).
Non c'est vraiment un bouquin à la fois déprimant dans ce qu'il présente et jouissif dans sa façon de faire éclater à chaque coin de page la mesquinerie de la médiocrité ordinaire (et c'est même pas typiquement américain, n'importe quel village sous nos latitudes a son lot de personnages du genre.)

Bref, ptêt qu'il te plaira pas pour autant, mais faut pas non plus que tu laisses cet a priori sur les a priori que tu crains de rencontrer dans le bouquin t’empêcher de l'ouvrir...

j'ai pas parlé du bouquin, mais de ce que tu en disais

Citation :

...Egolf livre une magnifique tirade [...] sur le Midwest profond : violence, racisme,
alcoolisme, crétinerie ambiante..

- justement pour avoir des éclaircissements

ratel a écrit:

Guic' the old a écrit:

ratel a écrit:

ce que vous en dites me laisse mal à l'aise - cultiver les stéréotypes anti-sud est un grand sport yankee que je n'aime pas trop

C'est extrêmement réducteur comme vision par rapport à ce que peut contenir ce bouquin, qui tient presque plus de la fresque à mes yeux...
Sachant qu'en plus, les personnages sont construits, certes par touche, mais ne sont pas des stéréotypes (enfin, des stéréotypes avec du fond,si tu vois ce que je veux dire).
Non c'est vraiment un bouquin à la fois déprimant dans ce qu'il présente et jouissif dans sa façon de faire éclater à chaque coin de page la mesquinerie de la médiocrité ordinaire (et c'est même pas typiquement américain, n'importe quel village sous nos latitudes a son lot de personnages du genre.)

Bref, ptêt qu'il te plaira pas pour autant, mais faut pas non plus que tu laisses cet a priori sur les a priori que tu crains de rencontrer dans le bouquin t’empêcher de l'ouvrir...

j'ai pas parlé du bouquin, mais de ce que tu en disais

Citation :

...Egolf livre une magnifique tirade [...] sur le Midwest profond : violence, racisme,
alcoolisme, crétinerie ambiante..

- justement pour avoir des éclaircissements

A ceci près que la citation que tu m'attribue est celle d'Omsk. La mienne étant: Comment un gamin pas génial mais malin est débrouillard peut voir sa vie
ruinée juste parce qu'il bvit dans un bled de rednecks bigots,
alcooliques et crétins.

(Perso, je vois plus la description de ses antagonistes contenue dans le "bigot, alcoolique et crétin" que dans redneck.
Après, soyons logique: si ton but est des denoncer un regroupement de bigots alcooliques et crétins aytant la mainmise sur un village paumé, il est plus utile de situer l'action dans le Midwest que dans l'Upper East Side...

Après, de toutes façons, mon point de vue, généralement, le problème n'est pas d'utiliser des stéréotypes. L'important est de savoir s'en servir finement.

Guic' the old a écrit:

A ceci près que la citation que tu m'attribue est celle d'Omsk.

dzolé


(mais on ne peut ignorer le contexte politique ni les objectifs des bouquins, que ça s'applique ici ou non - l'une des raisons pour lesquelles j'aime peu la littérature, d'ailleurs )

Si tu veux du contexte: C'est un bouquin qui a tout d'abord été publié en Français et en France, chez Gallimard, après avoir été refusé par plus d'une cinquantaine d'éditeurs américains (dont certains qui en ont publié des pas tendres genre Ellis ou Wolfe...)
Donc genre de bouquin à géner un peu aux entournures les "yankees".

Enfin, bon, si tu n'aimes point la littérature (même sans majuscule)...

ratel a écrit:

Guic' the old a écrit:

A ceci près que la citation que tu m'attribue est celle d'Omsk.

dzolé


(mais on ne peut ignorer le contexte politique ni les objectifs des bouquins, que ça s'applique ici ou non - l'une des raisons pour lesquelles j'aime peu la littérature, d'ailleurs )

Se poser des questions c'est sain, trop ça devient vite du domaine de la torture mentale

Je ne pense pas qu'Egolf ait écrit un bouquin à charge contre les blancs ruraux du centre des États-Unis. A vrai dire, je ne me suis pas torturé le ciboulot pour savoir ce qu'il en était. J'y ai vu une espèce de peinture au vitriol, un miroir déformant de ce que pouvait être la société de l'époque dans ces espaces (avec un fond de vérité sûrement). Et bien sûr la difficulté du personnage principal de grandir et d'évoluer dans cet univers.

Le roman se savoure car, outre son style, il s'agit d'une jolie satyre sur un trou qui, par définition, pourrait être universel. L'histoire m'a immédiatement embarqué et c'est là tout ce que je demandais au livre.

Je veux pouvoir relancer le débat dans 6 mois, je cours me procurer ce bouquin

ben c'est pour ça que j'aime peu la littérature - je n'aime guère être embarqué et en sortir en pensant qu'il y a sûrement un fond de vérité (parano, moi ? si peu... )

ratel a écrit:

ben c'est pour ça que j'aime peu la littérature - je n'aime guère être embarqué et en sortir en pensant qu'il y a sûrement un fond de vérité (parano, moi ? si peu... )

Sans vouloir te manquer de respect... Ce genre de raisonnement me parait, au mieux, obtus, au pire, absurde.JE sais pas, mais à mes yeux, c'est se gâcher son propre plaisir. Et la beauté du style ,et le plaisir d'oublier un moment sa petite vie... Et l'élévation de l'âme et de l'esprit ?

Après, Omsk a évidement raison dans le fait de "ne pas tirer des plans sur la comète": ce n'est ni un documentaire, ni une oeuvre de pure fiction (le fond étant totalement crédible)...

ah ben je ne recherche pas le plaisir, moi - plutôt l'absurdité en effet, elle me rassure

Ca devient le sujet psychanalyse, là, nan ?

- il est où le divan ?

N'importe quoi, c'est quoi ces excuses à deux balles pour pas le lire ?
'sont presque aussi nazes (bien que plus sophistiquées) que "ah ben non, j'ai pas le temps, pis je préfère lire le 20 minutes dans le train", "Céline c'était rien qu'un gros facho, pis les points de suspension ça fait mal aux yeux" et "ah ben non, j'ai la vue qui baisse, à mon âge, tu comprends, pis c'est écrit trop petit et j'ai perdu mes lunettes".
Ce livre est hallucinant, point barre. Et même si j'ai la mémoire qui flanche ( ), je me souviens d'y avoir senti une certaine affection pour les "rebuts" ; en gros c'est pas cruel, c'est cynique*.

Je suis pour ma part en plein... dans mes cours sur la perspective (édifiants certes, mais longs comme un jour sans pain) (ça m'apprendra à m'y prendre la veille).



Et en matière de vrais bouquins, j'en ai (comme d'hab') une pile "en cours" :

- le fortement recommandé, à juste titre (La conjuration des imbéciles) ;
- les authentiquement bizarres/crades/dérangés, que je ne recommande pas plus que ça mais tiens à finir pour l'honneur (La famille royale, Miso soup) ;
- le "mais à quoi je pensais quand je l'ai commencé ?", ou celui que j'ai bien peur de ne pas finir - désolée Béro (Du côté de chez Swann) ;
- la branlette intellectuelle ceux que je lis en me grattouillant le menton d'un air pénétré (Le détail, Logique de la sensation, La vie des formes).

Et je viens de déterrer une belle collec' de Fante.

* un peu comme les chroniques de Nanarland, qui pourraient se contenter d'être bassement moqueuses mais dans lesquelles pointent toujours tendresse et émerveillement

Citation :

Et je viens de déterrer une belle collec' de Fante

Tiens, je viens d'en commencer un! (je lis jamais autant que quand je suis censé réviser ) (putain je me souviens plus du titre)

Foxhole a écrit:

(La famille royale)

Grand livre.

Ouais, mais absolument pas recommandable (et c'est pas juste parce qu'il fait 1400 pages). Ou si, à un abonné aux histoire de bas-fonds glauques et déglingués.
J'ai tenté avec un ami - grave erreur, il n'a retenu de son vague feuilletage (oui, il l'a feuilleté) (feuilleté) du bouquin qu'une somme de phrases et d'expressions qui l'ont définitivement convaincu qu'il était quelqu'un de trop convenable pour m'emprunter des livres.

MC5 m'a tuer a écrit:

(je lis jamais autant que quand je suis censé réviser )

Tiens, étrange, il me semble que l'an dernier je me disais la même chose.

(genre elle travaille... )

MC5 m'a tuer a écrit:

Citation :

Et je viens de déterrer une belle collec' de Fante

Tiens, je viens d'en commencer un! (je lis jamais autant que quand je suis censé réviser ) (putain je me souviens plus du titre)

C'est lequel que t'as commencé ? Dans ce que j'ai lu du m'sieur, j'avoue une grosse affection pour La route de Los Angeles (son tout premier roman) et Grosse faim (un exceeeellent recueil de nouvelles, ptêt ce que j'ai préféré de lui, on y trouve vraiment toutes ses facettes...)
Ce sont vraiment ses 2 bouquins qui m'ont marqué.
'fin, faudra que je m'attaque à Demande à la poussière, la préface incluse dans Grosse faim est du genre estomaquante

Mon chien stupide vaut le coup... si on aime les chiens j'avais pas de smiley Toby sous le coude

Spoiler: