Et les livres sans images, alors?

Du post-apo US récent, on pense donc forcément à La route. Finalement, Heller s'en éloigne assez pour ne pas en produire une pâle copie. L'humanité est certes quasiment anéantie, et ceux qui restent ne sont pas des plus jouasses, mais le ton qui en sort se veut plus optimiste que chez McCarthy. Plaisant, le roman ne dresse pas tant que ça de plages de violences, célébrant finalement une nature à nouveau affirmée. 

L'originalité du bouquin, c'est d'associer dans ce décor (le Montana) deux individus que tout oppose : un baba qui explore les environs à bord d'un Cessna 182 et un agité de la gâchette qui tire avant de réfléchir. Pas hyper original mais qui se lit bien. Je mettrai un 7/10.

Peter Mermoz Steinhauser a écrit:

"C’est comme si Sarah Palin tombait enceinte de George Bush et accouchait du Big Lebowski." disent la 4e de couv ET ( ) la chronique des Inrocks. N'empêche, le bouquin est cool. Un genre de Groseille fan de catch et de monster trucks, portant mulet, casquette de base ball et t-shirts à manches coupées, tombé chez des Le Quesnoy milliardaires Tea partystes. Son frère, qui n'est pas son frère, se présente au Congrès. On rameute Blue Gene à cause de sa fibre popu. Bref, marrant. Belle plongée dans l'Amérique profonde.

Merci Peter, c'est très bien. À classer avec La conjuration des imbéciles et le Seigneur des porcheries.

excellent Ubik !
un de mes K Dick favoris

John the revelator a écrit:

Peter Mermoz Steinhauser a écrit:

"C’est comme si Sarah Palin tombait enceinte de George Bush et accouchait du Big Lebowski." disent la 4e de couv ET ( ) la chronique des Inrocks. N'empêche, le bouquin est cool. Un genre de Groseille fan de catch et de monster trucks, portant mulet, casquette de base ball et t-shirts à manches coupées, tombé chez des Le Quesnoy milliardaires Tea partystes. Son frère, qui n'est pas son frère, se présente au Congrès. On rameute Blue Gene à cause de sa fibre popu. Bref, marrant. Belle plongée dans l'Amérique profonde.

Merci Peter, c'est très bien. À classer avec La conjuration des imbéciles et le Seigneur des porcheries.

Chesterton, Hérétiques, très très drôle, je parie que ça plaît à Béro. Un art du paradoxe qu'il a moins veule que Wilde, des bonnes idées (bien qu'un peu trop libéral et démocrate à mon goût). Je me lis la suite, Orthodoxie, entre temps j'ai lu Le Désert des Tartares, vraiment magnifique.

J'ai lu Candide, de Voltaire, c'était vraiment pas terrible malgré le ton à la fois joyeux et méchant qui parfois peut être sympathique. J'aimerais bien trouver un écrivain comme Voltaire mais en intelligent, en fait.

Au cœur des ténèbres et Jeunesse de Joseph Conrad, le premier est très impressionnant. Le pire c'est que je ne savais même pas que « Apocalypse Now » en était inspiré (c'est pourtant censé être un de mes films préférés...), je m'en suis rendu compte au fur et à mesure. Le deuxième est chouette aussi quoiqu'un peu jargonnant sur les termes de navigation. Mais ça donne envie d'en lire d'autres.

Faire l'amour de Jean-Philippe Toussaint. Je ne sais pas pourquoi j'ai voulu lire ce livre, c'était nul.

Complètement d'accord avec toi pour Candide.

J'ai précisément lu Au coeur des ténèbres à cause d'Apocalypse Now, ça a dû être intéressant de le lire sans être au courant du rapport avec le film. Lord Jim c'est bien aussi sinon !

(par Julian Cope)

je vous invite à choper le pdf ici :

http://square-mixtapes.blogspot.fr/2008/04/julian-cope-krautrocksampler.html

Récit passionnant et ahurissant.

Yves Guillotines a écrit:

Chesterton, Hérétiques, très très drôle, je parie que ça plaît à Béro.

Ah ah ah, Chesterton, Chesterton! c'est le roi!
La rencontre entre un Monty Python métaphysicien, un Joseph de Maistre débonnaire qui écrirait les romans de Conan Doyle, la puissance de feu d'un Bernanos ou d'un Péguy, et un esprit évangélique lumineux qui en fait l'un des seuls "réactionnaires" bienheureux, nulle once de ressentiment.
Capable dans un billet de dézinguer le dolorisme sacrificiel de Tolstoï et les apories de Nietzsche sans parler du menu fretin la totalité des Tartuffe humanitaires qui ont pignon sur rue, de son temps et du nôtre. A nul autre pareil et d'une actualité brûlante, apocalyptique faudrait-il dire.

L'un des très rares auteurs postérieurs à Virgile qui soient dignes d’être lu.

ZigZagWanderer a écrit:

ça envoie du lourd ?

Frankystooge a écrit:

ça envoie du lourd ?

Mouaif, ça ressemble à de la blague pour lecteurs de Gonzaï ou Vice. Triste et post-moderne, parions-le.
D'une façon générale, je trouve que ce jeune homme plein de promesses qu'est Zigzag file un mauvais coton, question lectures en ce moment (Eddy B., Candide, J-P Toussaint... ).
Il serait temps de reprendre le droit chemin.

Béroalde De Fuzz a écrit:

Yves Guillotines a écrit:

Chesterton, Hérétiques, très très drôle, je parie que ça plaît à Béro.

Ah ah ah, Chesterton, Chesterton! c'est le roi!
La rencontre entre un Monty Python métaphysicien, un Joseph de Maistre débonnaire qui écrirait les romans de Conan Doyle, la puissance de feu d'un Bernanos ou d'un Péguy, et un esprit évangélique lumineux qui en fait l'un des seuls "réactionnaires" bienheureux, nulle once de ressentiment.
Capable dans un billet de dézinguer le dolorisme sacrificiel de Tolstoï et les apories de Nietzsche sans parler du menu fretin la totalité des Tartuffe humanitaires qui ont pignon sur rue, de son temps et du nôtre. A nul autre pareil et d'une actualité brûlante, apocalyptique faudrait-il dire.

L'un des très rares auteurs postérieurs à Virgile qui soient dignes d’être lu.

Hahaha, j'en étais sûr, mais je ne m'attendais pas à tant d'emphase (justifiée) ! 
Peut-être que du Wilde entre aussi dans les ingrédients : un certain art du paradoxe, sauf que Wilde utilise le paradoxe pour dire des choses originales (et un peu veules) et rigolotes, tandis que Chesterton l'utilise pour dire des choses saines et sensées. On peut aussi le comparer à Donoso Cortès, qui lui emploie sa raison et sa logique pour démontrer ce que les erreurs philosophiques ont de faux, tandis que Chesterton emploie l'une et l'autre pour démontrer ce qu'elles ont de ridicule.

Bon en ce moment j'ai piqué un Bernanos dans la bibliothèque paternelle, justement, mais ce n'est pas très confortable de lire un pamphlet dans un recueil de la Pléiade, je crois que je vais faire machine arrière plutôt que de me procurer La grande peur des bien-pensants en poche, d'autant que je me suis retrouvé face à quelque chose de costaud et d'obscur : il faudrait que je me tape du Drumont pour bien saisir de quoi il parle et je ne suis pas si disposé que ça à le faire.
Avant ça j'ai lu La Porte étroite de Gide, quelques bons trucs, pas folichon mais si court qu'on n'a pas le temps de s'en apercevoir.

La Bible.
(un petit résumé).

Sympa de voir Pilate à peu prés bien traité pour une fois.

Sinon, dans ma grande campagne de redecouverte des romans de ma jeunesse en vo, je me suis racheté The Stand de Stephen King. Avant ça, je fais durer autant que possible l’excellent Making Steam (qui pousse loin les réfections de Pratchett sur le progrès, le gouvernement, etc - ses derniers romans développent une thématique utopique qui n'est pas sans évoquer un Voltaire doué d'imagination), histoire de retarder le moment où je n'aurai plus de discworld à lire.

Je précise quand même que je ne lis pas ce livre, ni n'en est l'intention. Mais c'est vrai que concernant les fictions ce ne fut pas toujours folichon. J'ai entamé Le devisement du monde, le livre de Marco Polo, ça m'a l'air mieux.

Je viens d'entamer Politique réelle d'Antoine Blanc de Saint-Bonnet (son nom évoque deux -trois s'il s'agit d'une scandinave - fois les nibards quand-même...). La désuétude de sa langue le rend parfois difficilement intelligible, ou alors c'est son style qui est maladroit.

Bah alors les lettreux, on laisse passer ça?

Excellent... Ça se lit plaisamment, c'est court, précis, bien écrit (surtout si on aime les antanaclases). En plus l'édition est réussie. C'est bien entendu conseillé à tout le monde.

Allez, je sais que c'est pas bien mais je peux pas m'empêcher de recopier un court passage (sachant que le livre a été écrit 4 ans avant mail 68) :

Citation :

Plus généralement, si, dans leurs choix esthétiques, qui se portent souvent vers l'avant-garde, ou leurs choix politiques, souvent extrémistes, les étudiants parisiens sont et se veulent en rupture, s'ils s'engagent et entendent s'engager à contre-courant et à contre-pente, c'est que les valeurs de dilettantisme et de désinvolture, que les étudiants bourgeois importent dans le milieu étudiant et qui s'imposent, surtout à Paris, à l'ensemble des étudiants, sont en affinité avec les valeurs qui entrent dans l'idéal intellectuel de l'intelligence sans attache et sans racine. C'est pourquoi ils sont plus que tous les autres portés à confondre les ruptures symboliques de l'adolescence avec un accomplissement intellectuel. (...) Et le charme de certains engagements politiques tient souvent, pour une part, à ce qu'ils permettent de consommer symboliquement la rupture avec le milieu familial sous la forme à la fois la moins coûteuse et la plus scandaleuse.

Et puis même, pas tant parce que "c'est vrai" (j'en sais rien) que parce qu'il faut arrêter avec les conneries rabâchées par à peu près tout le monde ("détracteurs" comme "admirateurs") :

Citation :

Autre forme de la même abdication, mais plus dangereuse parce qu'elle s'armer d'une apparence de logique et se parer des apparences du relativisme sociologique, l'illusion populiste pourrait conduire à revendiquer la promotion à l'ordre de la culture enseignée par l'École des cultures parallèles portées par les classes plus défavorisées. Mais ce n'est pas assez de constater que la culture scolaire est une culture de classe, c'est tout faire pour qu'elle reste telle que d'agir comme si elle n'était que cela.

j'aime bien les idées de Bourdieu mais j'ai toujours trouvé son style un peu "confus" et les extraits que tu postes me font (peut être à tord) le même effet

ZigZagWanderer a écrit:

Excellent... Ça se lit plaisamment, c'est court, précis, bien écrit (surtout si on aime les antanaclases). En plus l'édition est réussie. C'est bien entendu conseillé à tout le monde.

Allez, je sais que c'est pas bien mais je peux pas m'empêcher de recopier un court passage (sachant que le livre a été écrit 4 ans avant mail 68) :

Citation :

Plus généralement, si, dans leurs choix esthétiques, qui se portent souvent vers l'avant-garde, ou leurs choix politiques, souvent extrémistes, les étudiants parisiens sont et se veulent en rupture, s'ils s'engagent et entendent s'engager à contre-courant et à contre-pente, c'est que les valeurs de dilettantisme et de désinvolture, que les étudiants bourgeois importent dans le milieu étudiant et qui s'imposent, surtout à Paris, à l'ensemble des étudiants, sont en affinité avec les valeurs qui entrent dans l'idéal intellectuel de l'intelligence sans attache et sans racine. C'est pourquoi ils sont plus que tous les autres portés à confondre les ruptures symboliques de l'adolescence avec un accomplissement intellectuel. (...) Et le charme de certains engagements politiques tient souvent, pour une part, à ce qu'ils permettent de consommer symboliquement la rupture avec le milieu familial sous la forme à la fois la moins coûteuse et la plus scandaleuse.

Et puis même, pas tant parce que "c'est vrai" (j'en sais rien) que parce qu'il faut arrêter avec les conneries rabâchées par à peu près tout le monde ("détracteurs" comme "admirateurs") :

Citation :

Autre forme de la même abdication, mais plus dangereuse parce qu'elle s'armer d'une apparence de logique et se parer des apparences du relativisme sociologique, l'illusion populiste pourrait conduire à revendiquer la promotion à l'ordre de la culture enseignée par l'École des cultures parallèles portées par les classes plus défavorisées. Mais ce n'est pas assez de constater que la culture scolaire est une culture de classe, c'est tout faire pour qu'elle reste telle que d'agir comme si elle n'était que cela.

Lu il y a des lustres, mais même si le Bourdieu-bashing est très en vogue, celui-ci reste un incontournable, au même titre que La Distinction.

Et Bourdieu c'est vraiment très très lisible, pas du tout confus ni sur la forme ni sur le fond. Par contre il y a assez peu d'idées qui lui soient propre a mettre à son crédit.

l'habitus peut être ?

blau_up a écrit:

l'habitus peut être ?

Il a beaucoup développé sur le sujet et a beaucoup popularisé la chose dans le domaine sociologique, mais fondamentalement le concept a toujours existé (que ce soit en philo ou en anthropologie comme chez Marcel Mauss), et même en socio on fait rarement une approche de l'habitus chez Bourdieu sans s'intéresser au moins à la même notion chez Norbert Elias. Encore une fois, ça ne remet pas en cause l'importance de son travail sur le sujet.

Lu La dame de pique de Pouchkine, lu les poèmes saturniens de Verlaine, lu le Salut par les juifs de Bloy (tant pis pour Drumont, pas vraiment envie de me farcir sa prose), lu les fleurs du mal de Baudelaire, et en ce moment je lis un recueil d'articles de Huysmans sur la peinture.